De grosses gorgones rouges à l'entrée d'une arche sous-marine. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
De grosses gorgones rouges à l'entrée d'une arche sous-marine. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)

En immersion aux îles Fidji

#Fidji #VitiLevu #Rakiraki #BlighWaters

  Fidji - août-sept 2023

13 août 2023. Deux guitares, un ukulélé. Trois hommes en chemises fleuries à manches courtes, portant la jupe traditionnelle fidjienne, accueillent en musique les passagers débarqués à l’aéroport de Nadi. « Bula ! », lance l’un des musiciens avec enthousiasme. Comprenez : « Bonjour », « Bienvenue »…

Arrivée aux Fidji en musique

Après dix heures de vol depuis Singapour, je suis enchantée de découvrir ce comité d’accueil ! Voilà qui me rappelle l’aéroport de Tahiti, où les touristes débarquant de l’avion sont pareillement accueillis en musique (souvenir d’un voyage de 2012, et scène que je revivrai quelques semaines plus tard à mon arrivée en Polynésie). De quoi faire patienter les gens dans la longue file d’attente pour le contrôle des passeports. Ci-dessous : court montage des vidéos faites à l’arrache au smartphone en arrivant…

Les îles Fidji, enfin, j’y suis ! Partout ou presque, dans l’archipel, je serai par la suite accueillie en musique à chaque étape de mon itinéraire. Et c’est en musique aussi que se font traditionnellement les au revoir chez les Fidjiens… Mais ça, je ne le sais pas encore quand j’arrive.

Me voici donc au cœur de l’océan Pacifique, entre la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française ! C’est vertigineux, grisant. J’ai prévu de passer six semaines aux Fidji, pour aller d’une île à l’autre sans me presser et plonger, plonger, plonger…

Après plus de trois années sans voyager, trois années à faire de la photo sous-marine principalement en Bretagne près de chez moi, c’est mon premier grand périple en dehors des frontières françaises. Retour dans les mers chaudes de la zone Indo-Pacifique et découverte de nouveaux horizons !

En avion, forcément. Au prix d’un bilan carbone démentiel… Cette pensée ne me quitte pas. Tout au long de ce voyage, je ne parviendrai pas à me défaire de cet étrange mélange d’euphorie et de culpabilité.

Les Fidji constituent la première étape de mon voyage de quatre mois, de la mi-août à la mi-décembre 2023. Après les Fidji, suivront la Polynésie, l’Australie, l’Indonésie.

Prendre l’avion. Réflexe à adopter de nos jours, maintenant qu’on est bien au courant de l’impact des trajets aériens sur le réchauffement climatique : calculer l’empreinte carbone de son voyage… 😱 Oui, ça calme. Chaque tonne de CO2 envoyée (ou pas) dans l’atmosphère compte. Il faut bien avoir conscience que s’envoler au bout du monde n’a rien d’anodin… À défaut de renoncer complètement à l’avion, on peut s’efforcer de réduire un peu son impact en partant moins souvent mais plus longtemps.

Plongée en famille à Rakiraki

J’ai décidé de commencer mon séjour fidjien par Rakiraki, village situé dans le nord de l’île principale de Viti Levu où je viens d’atterrir. Pourquoi Rakiraki ? Le littoral permet d’accéder à une zone maritime réputée pour la beauté de ses fonds coralliens, appelée Bligh Waters.

Le nom fait référence au Britannique William Bligh (1754-1817), commandant du fameux navire le Bounty qui subit une mutinerie en 1789. L’histoire est restée célèbre jusqu’à nos jours, notamment grâce au film Les révoltés du Bounty (1962) avec Marlon Brando. Je suivrai d’ailleurs un peu le sillage de ces fameux mutins du XVIIIe siècle : fin septembre 2023, j’irai comme eux à Tahiti, pour la deuxième étape de mon grand voyage dans le Pacifique… Mais revenons aux Fidji.

Quand on plonge depuis Rakiraki, on reste assez près de la côte. L’immense étendue des Bligh Waters, vaste passage maritime entre les îles de Viti Levu et Vanua Levu, n’est réellement accessible qu’en croisière-plongée. La zone est aussi appelée Vatu-i-Ra Passage, du nom d’une petite île située à l’est de Rakiraki. Elle est entourée par un récif corallien devenu un parc maritime protégé, le Vatu-i-Ra Conservation Park.

Lors de mes préparatifs, j’ai rêvé quelque temps d’embarquer à bord du Nai’a. C’était le seul bateau proposant des croisières-plongée dans les eaux fidjiennes. J’étais presque prête à casser ma tirelire pour réserver ma place, mais il n’y avait pas de disponibilité pour mes dates, entre mi-août et fin septembre.

J’ai ensuite envisagé de séjourner dans le seul et unique resort de plongée encore ouvert et opérationnel dans le secteur, après le cyclone Winston (2016) et le Covid (2020-2022). Mais le tarif des quelques chambres encore disponibles au Volivoli Beach Resort, les plus chères, était vraiment hors budget pour moi…

Alors, à force de chercher, j’ai fini par trouver l’option idéale : un séjour chez l’habitant AVEC de la plongée, chez Jioji et Alisi. Sur Airbnb, ce couple de Fidjiens loue trois chambres de sa maison familiale à la campagne, non loin du bourg de Rakiraki, près de la mangrove côtière. Dans le hangar du jardin, Jioji a ouvert en 2016 son propre petit centre de plongée : Ring Gold Divers.

Alisi et Jioji, mes hôtes à Rakiraki. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)

Jioji est instructeur, son fils Tom divemaster. Tom habite avec sa famille la maison voisine. Tous deux connaissent parfaitement les sites alentours, et ont longtemps été moniteurs dans d’autres centres de plongée fidjiens. Maintenant ils travaillent ensemble au sein de leur petite structure locale. Loin des foules et des « usines à bulles ».

Une affaire de famille, donc. Simple et sans prétention. Mais qui offre de la plongée « grand luxe », selon mes critères : plusieurs fois, je me suis retrouvée avec un bateau pour moi toute seule et Tom pour guide privé, durant la semaine passée chez eux… La famille possède plusieurs bateaux, ce qui permet, quand il y a plus de monde, de répartir les plongeurs selon les niveaux, formations, baptêmes du jour…

Bref, la configuration parfaite pour moi, me permettant de faire de la photo sous l’eau en toute tranquillité – en petit comité ou en duo avec Tom – sans jamais être gênée par des palanquées (groupes de plongeurs) trop nombreuses ou mal assorties !

Tom rassemble les blocs d'air qui vont servir aux plongées de la journée. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
Tom rassemble les blocs d’air qui vont servir aux plongées de la journée. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
La côte vue du large. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
La côte vue du large. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)

Premières images sous l’eau

Ça tombe bien, je suis à ce moment-là (en tout début de voyage) encore en phase d’apprentissage de mon nouveau matériel photographique : j’ai investi avant le départ dans le Canon Eos R7 et son caisson Nauticam, pour remplacer mon vieux 7D.

Beaucoup de frustration sous l’eau les premiers jours… Je dois me défaire des réflexes acquis sur mon ancien appareil. Les sujets ne manquent pas, sous la surface : il y a de splendides alcyonaires (coraux moux) jaune orangé partout, d’immenses gorgones (éventails de mer) rouge et rose, quelques requins pointe blanche timides… Et je n’ai même pas pris le temps de m’intéresser au « petit », cherchant surtout à faire des photos d’ambiance au fisheye.

Émerveillée à chacune de nos sorties, je ne sais où donner de la tête. Je dois tester, vérifier, recommencer, jusqu’à trouver les réglages qui fonctionnent le mieux avec ma nouvelle configuration. Je m’échine à positionner et doser correctement la lumière de mes flashs. À ajuster les paramètres (vitesse, ouverture, ISO) selon la visibilité et la luminosité venue de la surface. Petit à petit, ça vient…

Au sommet des récifs, des jardins coralliens, frétillants de vie. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
Au sommet des récifs, des jardins coralliens, frétillant de vie. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
Partout, des coraux mous d'un beau jaune orangé. (Rakiraki, Fidji, août 2024)
Partout, des coraux mous d’un beau jaune orangé. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
Entre les failles et les arches formées par le récif, une anémone et ses charmants locataires, des poissons clowns avec lesquels elle vit en symbiose. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
Entre les failles et les arches formées par le récif, une anémone et ses charmants locataires, des poissons clowns avec lesquels elle vit en symbiose. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
Des coraux moux jaillit une nuée d'anthias. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
Des coraux moux jaillit une nuée d’anthias. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
Au-dessus des récifs colonisés par les coraux mous jaune orangé, des nuées d'anthias. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
Au-dessus des récifs colonisés par les coraux mous jaune orangé, des nuées d’anthias. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
D'imposantes gorgones déploient leurs ramifications face au courant à l'entrée des canyons dans le récif. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
D’imposantes gorgones déploient leurs ramifications face au courant à l’entrée des canyons dans le récif. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
Du corail, des poissons, la vie ! (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
Du corail, des poissons, la vie ! (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)
De grosses gorgones rouges à l'entrée d'une arche sous-marine. (Rakiraki, Fidji, août 2023)
De grosses gorgones rouges à l’entrée d’une arche sous-marine. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)

Dans les grottes et cavités, des gorgones révèlent leurs couleurs éclatantes dans la lumière des flashs. (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2024)

Durant mon séjour, je n’aurai malheureusement pas l’occasion d’aller jusqu’à la zone maritime protégée de Vatu-i-Ra. Cela représente une navigation assez longue depuis Rakiraki, il faut donc à la fois assez de plongeurs pour rentabiliser le trajet et des conditions météo parfaites.

Mais les sites plus proches que je découvre suffisent à me combler. Et surtout, chaque excursion au large offre son lot de surprises. Un arc-en-ciel parfait qui surgit à l’horizon. Un banc de dauphins à long bec qui vient jouer devant l’étrave… C’est splendide, et nous sommes toujours seuls en mer. Pas de tourisme de masse dans le coin.

Je vous mets ci-dessous un petit montage vidéo provenant des stories que j’ai postées à l’époque sur mes réseaux sociaux (Instagram, Facebook) pour vous donner une idée de l’ambiance… 😎😍🏝️🐬

En fin de séjour, je vis une journée enchantée avec mes hôtes, qui m’organisent un déjeuner sur une plage déserte de l’île de Nananu-i-Ra, après les plongées de la matinée. Sous les cocotiers, quelques huttes et constructions en ruine, vestiges d’un resort abandonné.

Je me régale d’un poisson grillé, pêché et préparé par Alisi et une jeune nièce qui est en « stage » sur le bateau de plongée (elle est super forte en selfies), d’une noix de coco rafraîchissante coupée par Jioji et Tom… Ce jour-là, je suis la seule plongeuse à bord et ils se mettent en quatre pour moi.

Au-dessus des hauts-fonds coralliens, l'eau prend une couleur turquoise spectaculaire. (Rakiraki, Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Au-dessus des hauts-fonds coralliens, l’eau prend une couleur turquoise spectaculaire. (Rakiraki, Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Il n'y a que nous sur cette magnifique plage, située en face de la pénisule de Volivoli, sur l'île de Nananu-i-Ra... (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)
Il n’y a que nous sur cette magnifique plage, située en face de la pénisule de Volivoli, sur l’île de Nananu-i-Ra… (Rakiraki, Viti Levu, Fidji, août 2023)

Bonheurs simples à la fidjienne

À la fin de la semaine, je quitte ma famille d’accueil et ma grande chambre donnant sur la terrasse de la maison à regrets. Un foyer chaleureux, plein de vie et de gaieté, de petites attentions charmantes et de bonheurs simples, au milieu des rires et des jeux des enfants de la famille élargie – frères et sœurs, cousins et cousines, petits voisins et voisines…

Alisi, parfois aidée par sa sœur, me prépare tous les soirs des plats savoureux, généralement à base de légumes et de riz, avec poulet ou poisson, souvent sous forme de curry. Les Indiens arrivés à la fin du XIXe siècle et au début du XXe aux Fidji, du temps de la colonisation britannique, pour travailler dans les champs de canne à sucre, ont marqué de leur empreinte les habitudes culinaires de l’archipel.

Le soir, en cette saison, il fait un peu frais. Alors mes charmantes hôtesses veillent aussi à mon petit confort de grande frileuse pas fan de la douche froide : elles me font bouillir de l’eau qu’elles versent ensuite dans un grand seau. Je complète avec celle du robinet jusqu’à obtenir la température parfaite… J’ai un peu honte, mais quel bonheur de pouvoir se laver à l’eau chaude, après une journée de plongée !

Je me suis aussi un peu baladée au hasard des chemins de terre entre les champs de canne à sucre et les fermes des environs. J’ai fait les courses avec Alisi au marché de Rakiraki. Admiré les paysages montagneux alentours. Découvert avec Tom la tombe d’Udre Udre, chef fidjien mort autour de 1849, présenté comme « le pire cannibale » des Fidji. La légende raconte qu’il aurait mangé entre 872 et 999 personnes. Anthropophagie hors normes qui lui vaut de figurer dans les records Guinness.

À Rakiraki, la tombe du chef fidjien cannibale Udre Udre, mort en 1847, est devenue une attraction touristique. Les pierres alentour sont censées représenter ses victimes. (Viti Levu, Fidji, août 2023)
À Rakiraki, la tombe du chef fidjien cannibale Udre Udre, mort vers 1849, est devenue une attraction touristique. Les pierres alentour sont censées représenter ses victimes. Et dans plusieurs lieux touristiques, j’ai vu ce portrait affiché avec son nom, mais je ne sais pas si c’est vraiment lui… (Viti Levu, Fidji, août 2023)
Promenade au soleil couchant dans les champs derrière la maison de Jioji et Alisi. (Rakiraki, Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Promenade au soleil couchant dans les champs derrière la maison de Jioji et Alisi. (Rakiraki, Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Je n'ai jamais vu autant d'arcs-en-ciel que durant cette semaine à Rakiraki ! (Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Je n’ai jamais vu autant d’arcs-en-ciel que durant cette semaine à Rakiraki ! (Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Au marché de Rakiraki. Un dollar fidjien vaut environ 0,40 €. (Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Au marché de Rakiraki. Un dollar fidjien vaut environ 0,40 €. (Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Rakiraki est un petit bourg, mais le marché est immense. (Viti Levu, Fdiji, août 2023)
Rakiraki est un petit bourg, mais le marché est immense. (Viti Levu, Fdiji, août 2023)

J’ai même fini par me faire au goût étrange, à la fois terreux et piquant, du kava. Une boisson traditionnelle, concoctée à partir de la racine réduite en poudre d’une plante proche du poivrier. Je la découvre en compagnie d’autres touristes hébergés chez Jioji et Alisi, ou venus d’un petit hôtel situé un peu plus loin sur la route.

Chaque nouvelle arrivée donne lieu à une cérémonie de bienvenue, où l’on boit le kava, en présence du chef du village. Il faut dire : « Bula ! » et frapper dans ses mains à chaque bolée ingurgitée. Censé détendre les convives et renforcer l’amitié – et « aider à dormir », affirme Jioji – le kava accompagne aussi la plupart des réunions familiales ou amicales, jusque tard dans la nuit.

Le dernier soir, la ribambelle d’enfants se lance dans une adorable chorégraphie d’au revoir, devant la rangée de chaises où les adultes papotent. Avec une jeune Britannique, qui séjourne comme moi chez Jioji et Alisi, je dois aller danser avec les gamins, ce qui fait hurler de rire tout le monde et déclenche des applaudissements enthousiastes.

Un plongeur connaissant bien l’archipel m’avait prévenue avant le départ : « Tu verras, les Fidjiens sont les gens les plus gentils du monde… »

  Fidji - août-sept 2023

  Fidj + Polynésie + Australie + Indonésie - 2023

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