Indonésie : Weda [Halmahera] + Bangka [Sulawesi] - mars 2013
J’aime être sous l’eau. Mais j’aime aussi être SUR l’eau. Entre deux plongées, dans la baie de Weda, je savoure le plaisir de naviguer, d’un récif à l’autre, d’une crique à l’autre, sous le soleil indonésien.
Naviguer sur un bateau de plongée
C’était en mars 2013. Je vous ramène dans la baie de Weda, à Halmahera, la grande île du nord de l’archipel des Moluques, en Indonésie.
Je loge là, au Weda Resort, d’où nous partons plonger dans la baie tous les jours :
Sous l’eau, je m’émerveille devant la beauté des fonds sous-marins ou de minuscules créatures comme les hippocampes-pygmées.
Mais sur l’eau, je m’émerveille aussi.
J’adore être en mer. J’adore être sur un bateau qui navigue au bout du monde. J’aime contempler l’horizon et le sillage quand nous traversons la baie, j’aime voir défiler la forêt quand nous longeons le rivage, sans savoir encore ce que nous allons découvrir.
L’ambiance, sur le bateau, est sympa.
Nous sommes en tout petit comité. Quatre à six plongeurs selon les jours, nos deux guides indonésiens Johnny et Radyal, deux membres d’équipage, et parfois aussi Rob, le proprio du Wesa Resort, qui s’ajoute comme guide quand c’est nécessaire.
Je note avec amusement que je ne suis pas la seule dingue de photo subaquatique à trimballer mon reflex Canon dans un encombrant caisson étanche au fin fond de l’Indonésie. Sur le bateau, un couple de Hollandais a le même équipement Ikelite que moi pour leurs Nikon. À gauche, mon appareil, à droite, les leurs :
Entre deux plongées, on sympathise, on raconte des bêtises, on se prend en photo… On savoure le plaisir d’être là, loin de tout, le nez au vent, sous le soleil.
Le bonheur.
À deux reprises, lors de nos sorties, nous avons croisé des bancs de dauphins joueurs. L’équipage indonésien et nos guides ne sont jamais blasés par le spectacle et s’enthousiasment tout autant que nous, les touristes-plongeurs…
Et puis, il y a les rencontres de hasard, au gré de notre route, d’un site de plongée à l’autre : parfois des pêcheurs, ou des gens naviguant d’un village à l’autre, sur une pirogue traditionnelle.
Se poser des questions écologiques
Nous découvrons aussi de près un spectacle moins agréable à l’œil, mais qui a un impact important sur le plan économique, social et environnemental pour la population locale : l’énorme cargo d’une compagnie minière.
On l’aperçoit au loin, depuis le resort. Des barges y entreposent en permanence du minerai.
C’est aussi ça, l’Indonésie.
Des exploitations minières, il y en a partout dans l’archipel, et de plus en plus. Ici, à Halmahera, mais aussi dans le Nord-Sulawesi ou dans la péninsule de Papouasie, pour citer des régions où j’ai voyagé récemment. La richesse des sous-sols, en nickel, fer, or, cobalt, etc. suscite les convoitises, de compagnies chinoises en particulier.
Ci-dessous, une carte de 2011 trouvée sur le site PWC.com. Même si elle n’est pas lisible à cette échelle, chaque point de couleur représentant une zone d’exploitation minière, on voit bien l’ampleur du phénomène…

La magnifique Bangka Island (Nord-Sulawesi), où je suis allée aussi lors de ce périple de mars 2013, après un premier séjour en juillet 2010 (et dont je vous reparlerai dans de prochains posts), devrait échapper à un projet d’implantation minière, qui s’annonçait destructeur.
Selon la politique environnementale des exploitations minières, les conséquences écologiques sont plus ou moins catastrophiques : déforestation, empoisonnement du sol et de l’eau des rivières, accumulation de sédiments près des côtes qui étouffent peu à peu les fonds sous-marins…
Lors de leur toute première installation à Halmahera, il y a quelques années, Rob et Linda, les propriétaires du Weda Resort, avaient dû revoir complètement leur projet et se résigner à changer d’endroit, à cause de la proximité d’une de ces mines.
Leur nouveau Weda Resort, celui où j’ai résidé, entre jungle et mangrove, est situé à proximité des villages de Kobe et Sawai Itepo, et pas très loin non plus d’une autre mine, la Weda Bay Nickel. Mais, pour l’heure, les propriétaires du Weda Resort ont l’air d’entretenir de bons rapport cette compagnie. Celle-ci prétend se soucier plus que d’autres de l’impact écologique, économique et social de ses activités (ce que d’autres contestent, voir les liens que j’ai ajoutés un peu plus bas, en novembre 2013).
Détail intéressant : la mine Weda Bay Nickel est exploitée par des Français, en coopération, entre autres, avec l’usine de Sandouville près du Havre, en Haute-Normandie (sic). Visitez ces liens, ils apportent pas mal d’infos sur la région et les opérations menées par la compagnie minière française.
Pour ma part, je n’ai pas mené l’enquête et je ne suis pas en mesure d’émettre un avis éclairé sur la question. En plus, la baie de Weda est immense : d’une zone à l’autre, j’imagine que les situations doivent être très diverses. Je suis venue en touriste, je me suis contentée de plonger, et j’ai simplement pu constater qu’on trouvait encore dans la baie de Weda des récifs coralliens splendides.
N’empêche qu’il est permis de s’inquiéter : la baie de Weda restera-t-elle aussi belle et relativement préservée qu’elle donne l’impression de l’être aujourd’hui ?
Mise à jour : novembre 2013
Je viens de tomber sur des articles concernant la compagnie Weda Bay Nickel, et qui n’augurent rien de bon, hélas :
→ Indonésie : nickel contre une bouchée de pain [Courrier International]
→ Mine d’Eramet en Indonésie : un rapport dénonce l’appropriation des terres [Alterasia.org]
→ Un rapport alarmant sur les violations des droits des communautés [Amisdelaterre.org]
→ Selling their nickel for a dime [The Jakarta Post]
S’initier à la pêche au harpon
Entre deux plongées, nous faisons aussi halte dans de petites criques, le temps de l’intervalle de “dégazage”. Il faut laisser passer une bonne heure, pour que nos corps éliminent le trop plein d’azote accumulé durant la première plongée.
Le plus souvent, on profite de ce repos forcé pour faire du snorkeling (nage avec masque et tuba) en surface.
Sinon, on s’initie aux techniques de pêche locales.
Ce jour-là, c’est cours de harpon.
On a accosté un peu plus au sud dans la baie, je crois, à un endroit que je serais bien en peine de situer sur une carte. Apparemment, c’est près d’un village.
Sur le ponton, il y a deux petits garçons et, non loin, un monsieur que je suppose être leur papa. Les enfants jouent dans l’eau. Lui arpente les eaux peu profondes de la crique avec son harpon.
Les gamins, tout nus, se hâtent de renfiler tee-shirt et bermuda en découvrant qu’il y a des dames sur le bateau de touristes qui s’amarre.
Autour du ponton, dans une eau d’un bleu turquoise incroyable, il y a des bancs de poissons minuscules.
Notre pêcheur arrive pourtant à les harponner avec une précision sidérante.
L’un des gamins prend fièrement la pose avec une partie de la prise du jour.
Pendant que nos guides papotent avec le pêcheur, nous, les touristes, on joue les touristes : on prend des photos et on admire la vue.
Michael, mon “buddy” de plongée, se remet à l’eau avec son masque, son tuba et ses palmes, pour une nouvelle séance de snorkeling. Il n’en a jamais assez.
Le pêcheur, pour nous épater, retourne dans l’eau harponner une murène, qu’il dépose à nos pieds. La pauvre se tortille violemment sur les planches brûlantes du ponton. Mais son calvaire ne durera que quelques minutes, l’homme la rejette bien vite à l’eau. Manifestement, ça ne doit pas être terrible à manger, la murène…
Mais notre intervalle de surface s’achève. Il faut remonter sur le bateau. On repart plonger, laissant les enfants retourner à leurs jeux et le gars à sa pêche.
Maintenant que je suis rentrée en France, loin de la baie de Weda, j’ai plaisir à me remémorer ces chouettes petites escales entre deux plongées, à revoir ces photos.
Des moments uniques, tout aussi précieux, à mes yeux, que nos explorations subaquatiques !
🙂
Indonésie : Weda [Halmahera] + Bangka [Sulawesi] - mars 2013