Indonésie : Sulawesi - juillet 2010
Rantepao, enfin ! Point de chute idéal pour rayonner dans les villages et rizières du pays Toraja, appelé ici Tana Toraja. On est quasiment dans le centre de l’île de Sulawesi.
Revoir le pays Toraja
Depuis Makassar, il faut plus de huit heures de bus pour arriver en pays Toraja, appelé ici Tana Toraja.
La région est si belle, et m’avait fait si forte impression lors de mon premier périple à Sulawesi en 2007, il y a trois ans, que j’ai décidé d’y retourner.
Je ne suis pas déçue. J’y ai passé quatre jours fantastiques dans le pays Toraja ! Le seul fait de revoir la courbe élancée des toits tongkonan, typiques de la région, m’a fait chaud au cœur.



Arrivée à Rantepao
En débarquant du bus de nuit, vers 6h30 du matin, j’entraîne Sebastian, le jeune Norvégien qui voyageait dans le siège voisin du mien, au resto Riman, à la sortie nord de la ville, pour un petit-déjeuner bien mérité.
Très bon plan. En papotant avec le patron de l’endroit, on apprend qu’une cérémonie funéraire a lieu le jour même, à Bori, un village situé à quelques kilomètres au nord de Rantepao. Il nous propose ses services comme guide, bien évidemment.
Ce n’est pas qu’on ait vraiment besoin de lui, en fait. En louant un scooter, on peut y aller tout seuls comme des grands. Mais Sebastian ne se sent pas trop de piloter une bécane, et moi qui ai l’habitude de ces petites motorbikes locales, je préfère quand même être seule dessus… Avec un passager à l’arrière, je me sens moins assurée.
La journée s’organise vite et facilement : Sebastian montera à l’arrière de la moto de notre guide, et j’en loue une de mon côté que je garderai plusieurs jours pour pouvoir me balader à ma guise. On va poser nos petites affaires à la guesthouse Wisma Monton que je connais, à deux pas de là (c’était mon point de chute aussi, il y a trois ans). Le temps d’une douche, de se changer, et roule !
Cérémonie à Bori
Il y a foule à Bori. Détail étonnant, dans ce village : il y a… des menhirs ! Enfin, des pierres dressées, dans le style local.
C’est une grosse cérémonie, qui dure plusieurs jours. Le défunt est quelqu’un d’important et la famille est riche visiblement : une vingtaine de buffles et plus d’une centaine de cochons seront égorgés et dépecés pendant les festivités.
Ça sent le graillon, la chair brûlée… Ambiance cochon grillé, à la mode Toraja ! La viande est ensuite servie aux invités. Ce qui reste est distribué ou conservé.

Dans le pays Toraja, le rapport à la mort est singulier. On garde le défunt à la maison, embaumé, pendant de longs mois s’il le faut (parfois plusieurs années, paraît-il, le temps de réunir assez d’argent), jusqu’au jour des funérailles officielles, qui sont toujours organisées en juillet et août.
Tant que la cérémonie n’a pas eu lieu, le mort continue de faire partie du monde des vivants. Un peu comme le serait chez nous une personne dans le coma.
Je vous invite à relire ce que j’avais déjà écrit en 2007 sur le sujet, il y a trois ans, et à visionner ma petite vidéo de l’époque (en attendant de découvrir les nouvelles images que j’ai tournées à Bori), en suivant le lien ci-dessous :
→ Tana Toraja, c’est plus fort que toi
Mise à jour du 28 novembre 2010 : Ça y est, la vidéo faite à Bori est en ligne ! Elle donne une bonne idée de l’ambiance qui règne durant ces cérémonies funéraires traditionnelles en pays Toraja. Pour la voir, il suffit de suivre ce lien :
→ Funérailles Toraja : la vidéo





Tombes
Et puis, on n’enterre pas les morts chez les Torajas.
Les tombes sont creusées dans les rochers ou dans les falaises. Ou alors on place les cercueils dans des grottes naturelles. Le plus haut possible. En certains sites, comme ceux de Lemo ou de Londa, on peut aussi voir des tau-tau, les statues représentant les défunts. Ils surveillent les visiteurs, du haut de leur balcon de pierre.
À Ket’e Kesu, village traditionnel proche de Rantepao , il y a un site funéraire avec des tombes anciennes suspendues. Rongés par le temps et l’humidité, certains cercueils en bois se sont décrochés.
Ils gisent désormais au sol, offrant aux regards les ossements des défunts. Les touristes indonésiens, qui adorent se prendre mutuellement en photo, sourient à l’objectif devant les crânes. On en profite même pour faire une portrait de groupe avec la touriste française de passage ! Oui, le rapport des Indonésiens à la photo-souvenir est vraiment particulier…





Rien de morbide ni de sinistre dans tout ça. En tout cas, c’est ainsi que je l’ai ressenti. Les sites funéraires autour de Rantepao font partie du paysage. Ce ne sont pas des lieux tristes et clos comme nos cimetières. Au détour d’une route, d’un chemin, à l’entrée d’un village, au milieu d’une rizière, on peut tomber sur un gros rocher rond, percé de tombes. Certaines sont ornées d’une tête de buffle, de la croix chrétienne, coiffées d’un toit tongkonan.
C’est ainsi. La mort n’est pas cachée. Elle fait partie de la vie.

Revenir
Ma première journée en pays Toraja, avec cette spectaculaire cérémonie funéraire, puis la visite des sites de Ket’e Kesu et Londa, ressemble beaucoup à celle que j’avais vécue il y a trois ans. Un « classique » des circuits touristiques.
Mais cette sensation de « déjà-vu » me plaît. Revoir, redécouvrir, revivre… Revenir en des lieux que j’ai aimés fait aussi partie des joies du voyage. C’est un peu comme si je reprenais le fil du périple antérieur.
La visite des sites n’est finalement qu’un prétexte pour découvrir les alentours. La balade en elle-même, au milieu des rizières, suffit à mon bonheur. Il fait grand soleil en début de matinée et je me dis que je n’aimerais pas être à la place de ces petites silhouettes laborieuses que je vois courbées dans la boue des rizières, en plein cagnard.
Le long de la route, les paysans vannent le riz ou l’étalent sur des bâches pour le faire sécher. Les gens nous saluent gaiement, d’autre nous contemplent avec des yeux étonnés, des enfants se moquent de nous…
J’ai eu raison de revenir. C’est si beau !





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