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Du pays Toraja au lac Poso

  Indonésie : Sulawesi - juillet 2007

La suite de mon périple à Sulawesi !!! Nous sommes le samedi 14 juillet 2007. Départ de Rantepao, au cœur du pays Toraja à 7h du mat, sous un grand soleil. Arrivée douze heures plus tard, de nuit, sous une pluie battante, aux Siuri Beach Cottages, sur la rive ouest de l’immense lac Poso.

Le lac Poso, enfin !

Nous n’en croyons pas nos yeux, quand enfin, après avoir passé des heures et des heures à rouler, l’immense lac Poso surgit enfin, au bout de la route.

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Les Siuri Beach Cottages, où nous passons la nuit, sur la rive occidentale du lac, sont à une vingtaine de kilomètres de Tentena et 75 km de la ville de Poso, plus au nord.

La vraie récompense sera pour le lendemain, quand, au réveil, en ouvrant la porte de nos bungalows respectifs, nous découvrons une splendide plage de sable blond, déserte, et une eau transparente, tentante, irrésistible…

Vite, un plouf direct avant le petit-déj’ pour vérifier! Un bonheur, ce bain au saut du lit. On peut vraiment nager, l’eau est délicieuse, pas froide du tout et il fait beau.

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Siriu Beach, sur la rive ouest du lac Poso. Sable blond et eau transparente.

Mais attention, ça se mérite, un bain matinal dans le lac Poso. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’est pas facile à atteindre…

La route… tout un poème

Pour arriver jusque-là, nous avons enduré des heures et des heures de route pourrie, où l’on ne dépasse que rarement le 50km/h, pour cause de chaussée endommagée, nids-de-poule, ornières, roches, troncs et branchages tombés sur la route, passages caillouteux, tronçons gadouilleux…

Sans compter tous les obstacles vivants à éviter : troupeau de vaches indolentes, chiens et enfants intrépides, familles à moto, femmes ployant sous des fagots, carrioles de paysans tirées pas des buffles, camions ou bus surchargés, crachant une fumée noire…

Mais je ne regrette vraiment pas d’avoir annulé mon vol Makassar-Luwuk! Ce changement de programme me permet de découvrir le Centre-Sulawesi, dont je n’aurais rien vu autrement.

En me joignant à la petite famille de Hollandais (rencontrés quelques jours plus tôt dans le bus entre Makassar et Rantepao), j’ai l’heur de bénéficier de la confortable et robuste voiture de style 4×4, avec air conditionné, qu’ils ont louée pour remonter vers le nord. Et franchement, ça n’est pas du luxe, vu l’état de la voirie, dans le coin.

Notre chauffeur, Ynus, en plus d’être un type charmant, est bon conducteur. Il connaît les routes par cœur, il roule prudemment (chose suffisamment rare dans ces contrées pour être notée), il s’arrête dès qu’il voit que les gamins de mes nouveaux amis Hollandais ont la nausée, dans les jolies routes en lacet des montagnes.

La ferme aux crocodiles

Et il nous fait toutes les pauses touristiques et panoramiques requises en chemin… Dont une triste ferme de crocodiles, tout près de Rantepao, halte acceptée par Johan, le père, avec mon assentiment, lors du marchandage du trajet.

Au programme: dépiautage sous nos yeux pas très enthousiastes de gros serpents, apportés par des paysans. Le gars de la ferme en conserve précieusement la peau pour la revendre. Ensuite, hachage de la chair des serpents en morceaux. Et c’est un môme haut comme trois pommes qui manie la machette, pas peu fier de nous montrer comment il s’y prend!

Les tronçons sont alors jetés en pâture aux crocos qui croupissent derrière de hauts murs dans une mare gadouilleuse.

Les gros crocos gris croupissent dans une marre gadouilleuse où on leur jette en pâture des tronçons de serpent.
Les gros crocos gris croupissent dans une marre gadouilleuse où on leur jette en pâture des tronçons de serpent.

Les bêtes sont impressionnantes. De vrais lézards de Préhistoire. Mais nous sommes contents de partir.

Il fait une chaleur torride. Passée la fascination première, on se sent un peu mal à l’aise. L’atmosphère est vaguement sinistre, pesante.

La cascade aux papillons

La plus plaisante des haltes “touristiques“ sera la fameuse cascade aux papillons, un peu plus au nord, à quelques heures de route de Rantepao. C’est un spectacle étonnant, qui ravit les petits comme les grands.

Au pied d’une chute d’eau, enfouie dans la végétation, il y a un pont. Et près de la chaussée autour du pont, où tous les véhicules s’arrêtent, le sol est jonché de détritus. Mais pas que.

Au-dessus des débris de plastique colorés, des dizaines d’ailes volettent, de ci de là. Les petits s’extasient, courent après avec l’appareil numérique. La pause un peu plus loin sous les arbres, près de l’eau vive, au milieu des papillons, est rafraîchissante et bien agréable pour se dégourdir un peu les jambes.

Check-points militaires

Partout, la blondeur de ces enfants au type bien nordique fascine les gens. Les trois gosses en ont un peu marre, de se faire tripoter, cajoler, tirer le portrait chaque fois qu’on s’arrête dans un boui-boui pour se ravitailler en eau ou en biscuits.

Seule trace visible, pour nous, des violences survenues quelques années plus tôt entre musulmans et chrétiens: deux-trois check-points militaires.

Les affrontements en 2000 dans la région du lac Poso ont fait près d’un millier de morts. En mai 2005, un attentat dans le marché de Tentena, ville à majorité chrétienne, a tué une vingtaine de personnes… Ynus répond volontiers à nos questions. La situation est en principe apaisée, et le trajet présente maintenant peu de risque pour les rares voyageurs de passage. Les routes sont contrôlées. Mais les gens comme lui, qui bossent dans le tourisme, ont bien du mal à trouver des clients désormais.

Quand on présente les passeports, les officiels demandent évidemment, chaque fois, à voir les trois blondinets. Ronja, Jelle et Silke (les J des prénoms hollandais se prononcent Y) descendent alors de la voiture, se prêtent gentiment à la parade. Notre chauffeur lâche de son côté quelques roupies au gars en faction, histoire d’accélérer les formalités… Pratique courante, et qui arrange tout le monde.

Arrivée au lac Poso au crépuscule

Nous arrivons au lac Poso au crépuscule. J’ouvre de grands yeux étonnés quand nous traversons un village rempli de constructions de style balinais. Chaque maison a sa petite entrée qui ressemble à un temple.

Ynus nous explique que le gouvernement indonésien, pour des raisons démographiques et économiques, a “incité” la population à migrer d’une île à l’autre, avec la promesse d’un lopin de terre et d’une aide pour construire la maison. Ici, ce sont des gens de Bali qu’on a transplantés.

La nuit tombe, une averse drue s’abat sur la route. Nous ne savons pas du tout où nous allons arriver. Nous n’en finissons pas de longer le lac Poso, de traverser des villages sans lumière, de scruter la route étroite derrière le pare-brise ruisselant. Notre soulagement est grand quand nous arrivons aux Siuri Beach Cottages.

Évidemment, difficile de marchander, vu que nous n’avons pas tellement d’autre solution pour la nuit. Mais les bungalows ne sont pas si mal et nous n’avons pas encore vu de jour la belle plage qui nous entoure… La famille qui tient l’endroit s’affaire vite en cuisine, avec le peu qu’ils ont, et court faire les lits. Nous sommes les seuls clients.

On est tous crevés, alors on verra demain. Une assiette de mie goreng (nouilles sautées) et zou, au dodo!

  Indonésie : Sulawesi - juillet 2007

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